Article réalisé à partir d’une clé Switch fournie par PLAION.
Paru initialement en 2011 (uniquement au Japon) sur PSP, Trails to Azure, suite et fin de l’arc Crossbell initié dans Trails from Zero aura mis 12 longues années à nous faire l’honneur d’une sortie européenne. Dire qu’il était attendu est un doux euphémisme, puisqu’il a la lourde tâche de combler un trou scénaristique resté béant dans la fresque épique du studio Nihon Falcom. Il faut dire qu’avec une série découpée en arcs narratifs tous interdépendants, le moindre maillon absent de la chaîne peut poser quelques problèmes de compréhension. Même si nous avons pu rattraper en partie notre retard aujourd’hui grâce à la publication chez nous de la trilogie Sky, nombreux sont les joueurs à avoir découvert la saga Legend of Heroes avec les aventures de Rean Schwarzer. Mais qu’à cela ne tienne, c’est l’heure de clôturer le chapitre de la SSS et d’amorcer Cold Steel. Trails to Azure est-il bien la pierre angulaire qu’on espère ? Et surtout, propose-t-il lui-même une aventure assez haletante pour nous redonner envie de sacrifier nos heures de sommeil ?
Kiseki, en avant les histoires
Pour y voir un peu plus clair dans l’immense fresque Legend of Heroes, et pour mieux situer Trails to Azure, commençons par un peu d’histoire. Initiée en 1989 avec un premier épisode intitulé Dragon Slayer : The Legend of Heroes, la série a évolué jusqu’à devenir ce qu’on appelle communément la “saga Trails” avec le premier Trails in the Sky, paru en 2004. C’est à compter de cet opus que Falcom a entrepris la création d’un univers gigantesque, commun à tous les épisodes et constitué d’arcs narratifs étendant leurs ramifications à tous les autres jeux. Les titres partagent de plus la même timeline, favorisant la mise en place d’intrigues politiques aussi riches que denses, s’étendant sur près de trois décennies de jeux. Ça paraît impressionnant ? Ça l’est encore plus manette en mains. Heureusement, s’il est évidemment appréciable “d’avoir tout fait” pour bien tout comprendre, Falcom a découpé son épopée en grands arcs narratifs : la trilogie Sky, le diptyque de Crossbell, les quatre Cold Steel et, plus récemment, les deux Kuro no Kiseki qui devraient (en tout cas on l’espère fort) débarquer prochainement dans toutes les bonnes crèmeries. Il est donc parfaitement possible de prendre le train en marche, même si les tenants et aboutissants de certaines intrigues pourront sembler plus abstraits sans les bonnes références. Trails to Azure est le deuxième et dernier épisode de l’arc Crossbell et se situe chronologiquement en parallèle du premier Trails of Cold Steel. En bref, un véritable chaînon manquant que les fans attendaient impatiemment de découvrir.
Trails to emmerdes
Trails to Azure se situe quelques mois après la conclusion de Trails from Zero. On retrouve la Special Support Section, une unité de police de la ville-état indépendante de Crossbell, venant à peine de reprendre ses activités après un repos bien mérité. Après les exploits de Lloyd Bannings, leader du groupe, et de ses camarades, la paix s’est temporairement installée et la SSS jouit désormais d’une belle notoriété. Cette accalmie a même permis à chacun de vaquer à des occupations personnelles et d’enrichir les effectifs de la Section Support de nouvelles têtes. Pour autant, et malgré la disparition présumée de la secte qui sévissait dans Trails from Zero, la ville est toujours dans une situation délicate, à la fois rongée par la corruption et ballotée dans le jeu politique des pays voisins, qui semblent soudainement s’intéresser de près à Crossbell. De quoi donner bien des inquiétudes aux autorités locales et raviver les tensions. Pour les membres de la SSS, la situation est plus qu’épineuse, partagés entre leur réputation grandissante les plaçant au centre de toutes les attentions et la garde de KeA, une jeune fille aux étranges capacités et sujette à bien des convoitises. L’ampleur des enjeux a franchi un nouveau palier. Désormais, le moindre faux pas pourrait avoir des répercussions diplomatiques catastrophiques. La SSS parviendra-t-elle, une fois encore, à surmonter les obstacles ou finira-t-elle broyée sous le poids de complots et de machinations qui la dépassent totalement ?
Botter des culs avec son gros cerveau
Ceux qui ont eu la chance de pratiquer Trails from Zero retrouveront instantanément leurs repères dans Trails to Azure. Et ceux qui ont dosé Sky et Cold Steel n’en seront pas si éloignés, mais devront apprendre à dompter quelques nuances. En bonne suite directe, ce second épisode lâche la SSS dans la nature en mode Fullpower, toujours dotée des capacités de combat obtenues dans le premier jeu. On retrouve donc le même système, la même interface et les mêmes mécaniques, qui s’agrémentent de quelques nouveautés tout de même. La gestion des quartz, des cristaux débloquant des magies offensives et défensives (les arts) en les insérant dans un sphérier (materia-style) est toujours de la partie. On passe tout de même au système Enigma V2, avec l’ajout notable des Master Quartz, gemmes uniques capables d’emmagasiner de l’expérience et apportant un gros boost de statistiques et un effet de soutien. En combat, le joueur doit toujours jongler avec la gestion de ses Energy Points, consommés lors de l’utilisation d’arts, et ses Craft Points, servant à utiliser les puissantes compétences spéciales uniques (et terriblement classes) de chaque personnage. Petite nouveauté, les CP peuvent désormais servir à utiliser des attaques combinées pour envoyer deux de ses personnages maroufler du mob en tandem. Ajoutez à ça la gestion des tours de jeu via une frise temporelle, les mini-bonus aléatoire (du simple regain de PV en début de tour au team rush aussi gratuit que décomplexé), des burst accessibles à certains moments clés et permettant au joueur d’enchaîner ses adversaires comme un fieffé fifou et vous obtenez un ensemble aussi réjouissant que solide. Dans le jargon, on appelle ça le “Falcom Punch”.
Gardiens de la Paix avant tout
Les mécaniques sont solides, mais qu’en est-il de l’histoire ? De par sa nature d’épisode de transition avec Cold Steel, Trails to Azure se pose d’office comme un incontournable pour les fans de la première heure. Les liens tissés avec les précédents épisodes de la franchise et les préparations vers l’intrigue Erébonienne sont à eux seuls des trajectoires parallèles passionnantes à explorer. Pour les autres, Azure conclut de façon satisfaisante plusieurs segments narratifs, initiés dans Zero donc forcément plus resserrés sur les membres de la SSS, et propose assez d’enjeux propres et de nouveaux personnages intéressants pour rattacher les wagons. Bien sûr, il est tout de même vivement conseillé d’avoir pratiqué Zero, surtout compte tenu du contenu rachitique du résumé de l’épisode précédent disponible dans le menu du jeu. Seuls plans B potentiels : écumer les wikis ou faire les yeux humides à son Falcom-sensei personnel. Côté structure, on retrouve l’habituel découpage en journées de la série, chacune avec son lot de quêtes obligatoires pour faire progresser l’intrigue, quêtes secondaires et autres quêtes cachées qui deviennent inaccessibles quand elles ne sont pas gérées à temps. Toutes bénéficient d’attention sur leur écriture et apportent une petite pierre à l’immense édifice du world building falcomien. Une narration dense, bourrée de dialogues, pour un tempo engourdi en début d’aventure. Mais quand les enjeux s’emballent, en avant l’escalade. Cerise sur le gâteau, le rythme global se trouve fluidifié par rapport à son aîné de par l’apport inestimable de la SSS-mobile. Finies, les allées et venues à pieds et en bus, ce spacieux destrier mécanique est là pour véhiculer et régénérer toute la troupe. Une vraie bouffée d’air.
Dérives policières
Sur le plan technique, Trails to Azure se place dans l’exacte même veine que son aîné et affiche un rendu à l’ancienne, tout en sprites 2D chibi façon mini-figurines. Le travail de lissage consenti sur son modèle d’origine est par ailleurs plutôt qualitatif. Le jeu s’en sort avec les honneurs également côté fluidité, même sur Switch, où quelques rares saccades mineures ont été aperçues. Côté direction artistique, production Falcom oblige, les environnements 3D sont loin des standards du jour, d’autant qu’on parle d’un titre sorti sur PSP. Reste que le design des personnages régale toujours autant, avec l’affichage de portraits parfois immenses durant les dialogues. Niveau enrobage sonore, les compositions musicales sont de grande qualité et savent parfaitement distiller ce petit souffle épique qui va bien au bon moment. Un excellent RPG, auquel il faut tout de même reconnaître les mêmes défauts que pour l’immense majorité des autres titres de la franchise. Qu’on se le dise avant de se lancer, Trails to Azure est un titre long, pas vraiment chatoyant pour les joueurs qui ne jurent que par les AAA, souvent plus exigeant que la moyenne, bavard et uniquement disponible en anglais. Son rythme ne conviendra pas aux joueurs qui veulent plonger dans le feu de l’action et qui ont besoin de cerner tout de suite les tenants et aboutissants d’une aventure pour y adhérer. Un Trails, un peu comme un Persona, prend le temps de poser ses enjeux et récompense toujours les joueurs assidus d’une façon ou d’une autre. En bref, Trails to Azure est un titre qui demande un certain investissement, mais le jeu en vaut la chandelle.
Conclusion
12 ans d’attente et de frustration ont été nécessaires, mais l’arc Crossbell est enfin complet et disponible en Europe. Et le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il s’agit d’un sacré feu d’artifice. Le plaisir de retrouver Lloyd et sa clique et de mieux comprendre les tenants et aboutissants des événements de Cold Steel est évidemment un sacré atout pour conquérir les fans. Mais le titre de Falcom n’oublie pas de proposer une aventure riche en rebondissements et en émotions à quiconque acceptera de composer avec un rythme souvent lent et de grands tunnels narratifs, le tout uniquement disponible en anglais. Mais on ne boudera pas trop longtemps notre plaisir tant il était inespéré de voir l’arc disparu enfin disponible chez nous. Lustré sur son gameplay, doté d’un casting extrêmement attachant et à l’évolution intéressante, Trails to Azure est bien au niveau que tous les fans attendaient. Toutefois, il est tout de même vivement conseillé aux nouveaux venus d’à minima commencer par Zero. L’investissement est certes plus lourd, mais démultiplie l’affect et l’impact de ce nouveau chapitre. Vous voilà prévenu.
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