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Voilà déjà sept jours que nous sommes au Japon, et nous avons du mal à réaliser que nous sommes à la moitié de notre voyage. C’est que le temps passe vite quand on se sent bien quelque part. Voilà en substance la teneur de notre rapide conversation en cette nouvelle matinée sur le sol nippon. Aujourd’hui est une journée assez chargée, puisque c’est celle de notre première vraie excursion en dehors de Tôkyô. Depuis plusieurs jours, nous l’avions repoussée, la faute à une météo incertaine, mais cette fois, c’est la bonne, cette journée sera celle de la visite de Kamakura (鎌倉市), célèbre ville balnéaire de la préfecture de Kanagawa (神奈川県, Kanagawa-ken) située à une cinquantaine de kilomètres au sud-ouest de Tôkyô. Depuis le temps que nous attendions le moment propice pour nous y rendre, nous sommes particulièrement pressés de prendre notre train.

Et ça tombe bien, puisque plus tôt nous serons sur place, moins nous devrons compresser nos envies. Un rapide passage au Konbini du coin, le temps de constituer une petite réserve de melon pan et de boissons, et nous prenons la direction du quartier de Shinjuku (新宿区, Shinjuku-ku). C’est là bas que nous devons rejoindre les lignes de la compagnie Odakyu. Parce que oui, au Japon, il y a plusieurs compagnies ferroviaires privées qui coexistent, chacune avec ses tarifs, ses horaires et ses abonnements, ce qui a sans doute provoqué son petit lot de déconvenues auprès des touristes les moins préparés. Le JR Pass ne fonctionne que sur les lignes de la compagnie Japan Railways, mais la destination qui nous intéresse aujourd’hui n’est desservie que par la Odakyu. Fort heureusement, nous avons potassé notre sujet des mois en avance (surtout Madame) et avons appris l’existence d’une formule pour notre périple. Il s’agit du FreePass Enoshima-Kamakura, très avantageux d’un point de vue financier (comptez 1520 yens, soit environ 13 euros par adulte et 770 yens pour les enfants), puisqu’il permet d’effectuer un aller retour unique de la gare de Shinjuku jusqu’à celle de Fujisawa et de profiter de façon illimitée pendant toute une journée des trains qui parcourent la ligne de chemin de fer électrique d’Enoshima jusqu’à Kamakura. C’est sur cette ligne hautement touristique et qui longe le littoral sur une dizaine de kilomètres que se situent, entre autres, le Kōtoku-in (高徳院), temple abritant le célèbre grand Bouddha de Kamakura ainsi que le temple bouddhiste d’Hase-Dera (長谷寺), que nous n’avons malheureusement pas pu de visiter.

Après deux heures de métro et de train, nous arrivons enfin à la gare de Kamakura, et nous constatons que choisir un dimanche pour cette sortie n’était sans doute pas notre meilleure idée. En dehors du TGS, c’est la première fois que nous nous sommes retrouvés confrontés à une foule aussi dense depuis notre arrivée sur le sol nippon.

Qu’à celà ne tienne, nous voilà partis pour une quinzaine de minutes de marche, en direction de notre premier objectif de la journée, le Sanctuaire Shinto Tsurugaoka Hachimangu (鶴岡八幡宮), vieux de plus 800 ans et considéré par beaucoup comme étant l’âme de la ville. Mais au moment de s’engager dans une rue commerçante noire de monde, une boutique Ghibli sauvage fait son apparition. Comme tout le monde le sait, les attaques de type fée sont super efficaces sur les dragons, par conséquent, le membre féminin de notre binôme passe instantanément en mode “oubli de soi” et fonce à l’intérieur de l’échoppe. Vingt minutes et quelques achats “raisonnables de première nécessité” plus tard, nous nous remettons en route avec en poche quelques petits souvenirs ainsi qu’un nouveau tampon pour notre collection.

La progression est difficile, à plus forte raison pour Sydouce, puisque Firelith, particulièrement taquin, s’affaire à la chambrer, elle qui déclarait encore une heure plus tôt que cette journée serait placée sous le signe de l’efficacité et du respect du planning. Mais quelques dizaines de mètres plus loin, le karma applique sa sentence irrévocable pour le plus grand plaisir de Madame, puisque Firelith aperçoit une boutique artisanale vendant des bracelets de perles de bois. Sydouce se pare alors de son plus beau sourire innocent, de ceux qui signifient “Allez, vas-y jeter un oeil, ça te fait tant envie. Par contre, vu que tu as voulu jouer, tu m’en voudras pas si j’applique tes règles.” et Firelith comprend que sa punition sera sévère mais juste.

Finalement, entre la progression ralentie par la foule et nos quelques digressions touristiques, il nous a fallu près d’une heure pour arriver au sanctuaire. Dès l’entrée, les lieux en imposent, et le spectacle de la foule qui arpente les grands escaliers qui mènent jusqu’au bâtiment principal, vieux de 800 ans, est plutôt impressionnant. En plus du sanctuaire, la zone abrite également le musée des trésors de Kamakura, des jardins avec des étangs et les restes d’un arbre ginko gigantesque.

Après une petite promenade dans les jardins, nous décidons d’aller collecter le goshuin local avant nous attaquer aux nombreuses marches qui mènent au sommet. De là-haut, l’endroit offre un panorama très sympathique sur la ville et sur la Dankazura (段葛), une allée magnifique qui mène au temple, ornée de Tori et dédiée à Hachiman, dieu shinto de la guerre. En redescendant, nous avons eu la chance d’assister à une cérémonie de mariage traditionnel magnifique, mais durant laquelle nous avons préféré nous abstenir de prendre des photos par politesse. Malgré la foule, la visite de ce sanctuaire splendide fut un moment particulièrement agréable, au point que nous avons oublié toute notion du temps qui passe et avons finalement passé beaucoup plus de temps que prévu sur place. Une rapide traversée de la Dankazura afin de l’admirer d’un peu plus près et de prendre quelques clichés, puis nous rejoignons la petite gare ferroviaire permettant d’emprunter la ligne Enoden (江ノ島電鉄, Enoshima dentetsu) pour continuer notre exploration des lieux.

Au vu du monde, nous faisons le pari de commencer par l’une des destinations les plus lointaines, en espérant pouvoir prendre le contre-pied des autres touristes. Sans le savoir, nous commettons alors une énorme erreur de jugement, puisque nous allons purement et simplement nous retrouver happés par Enoshima (江の島), et plus particulièrement son île. Il nous faudra environ une vingtaine de minutes de voyage dans un train dont le charme désuet nous a plongés au coeur d’un film Ghibli pour effectuer le trajet. Malheureusement, nous avons eu beaucoup de mal à profiter de la vue tant le train était bondé.

Cette photo appartient au site Kanpai

C’est n’est donc qu’en posant un pied à quai que nous apercevons enfin la mer et la baie de Sagami (相模湾). Nous avons également entrepris de chercher ce cher Fuji-san, car nous avions entendu dire que Enoshima pouvait offrir, lorsque la météo était clémente, une magnifique vue sur le fameux pic montagneux. Malheureusement, ce fut notre premier rendez-vous manqué avec lui, puisqu’il a préféré rester bien caché dans les nuages ce jour-là. Qu’à cela ne tienne, il nous reste beaucoup à découvrir, nous commençons donc par explorer la petite bourgade en nous promenant dans les petites allées autour de la gare. Nous empruntons ensuite le grand pont (environ 600 mètres de long) qui relie le continent à la fameuse île. Encore une fois, la foule entrave notre progression, mais puisqu’en contrepartie, nous profitons de la musique d’un festival débute sur la plage, le moral est au beau fixe. C’est donc au pas et quasiment à la queue leu-leu que nous effectuons la traversée. Une fois arrivés de l’autre côté, nous décidons de laisser un peu de répis à nos jambes endolories par les kilomètres engloutis les jours précédents et optons pour un petit break. Une petite crêpe japonaise, posés sur une terrasse en bordure d’océan c’est toujours appréciable.

Durant cette petite pause, nous découvrons que nous sommes à deux pas du Enoshima Island Spa (article en français) et décidons alors de nous accorder un petit interlude détente entre deux visites touristiques. Confiants, nous pénétrons dans le magnifique établissement qui abrite les sources chaudes en planifiant d’y passer deux heures au maximum. Mais vous imaginez bien qu’une fois de plus, nous n’avons pas réussi à nous en tenir au planning.

Aussi beau à l’intérieur qu’à l’extérieur, le bâtiment est divisé en quatre parties. Deux parties Onsen* sont exclusives suivant le sexe et s’arpentent nu et armé de sa seule serviette, une troisième partie spa et piscines, quant à elle mixte, impose donc le port du maillot de bain et la quatrième partie est un grand restaurant occupant tout le dernier étage de l’édifice. Il est important de préciser que si l’entrée de l’établissement reste assez accessible (comptez une trentaine d’euros par adulte pour une durée illimitée et un accès complet aux installations), il s’agit d’un établissement qui fonctionne avec un système de bracelet à puce permettant d’accéder au restaurant, à divers mini-bars où sont servis d’assez onéreux encas et boissons ainsi qu’à diverses prestations de massages ou encore d’aromathérapie. La note peut très rapidement gonfler pour peu qu’on se laisse un peu aller, d’autant plus qu’à aucun moment on ne peut consulter le suivi exact des dépenses.

Pour notre part, nous avons préféré éviter d’avoir recours à ces prestations bonus. Et il y avait déjà fort à faire, les portions dédiées aux Onsen recèlent de nombreux bassins aux caractéristiques variées (eau gazeuse, variations de températures, …) ainsi que de nombreux programmes placardés aux murs permettant de profiter au mieux des bienfaits de sources naturelles puisées à 1500 mètres de profondeur. La partie mixte, elle, est constituée de nombreuses piscines, dont deux gros coups de cœur pour notre binôme : l’une diffusant de la musique classique audible uniquement la tête immergée et l’autre en bordure d’océan avec une vue imprenable sur la baie et sur le Mont Fuji “par temps dégagé”.

Nous étions déjà conquis par les “simples” bains de notre hôtel à Tôkyô, le Enoshima Island Spa a définitivement confirmé notre amour pour les thermes traditionnels japonais. A noter toutefois que si Sydouce a particulièrement apprécié la propreté impeccable des lieux, même après le passage d’une foule de clients, Firelith a eu la surprise de se retrouver confronté à l’envers du décors en la personne d’une grand-mère japonaise qui passait la serpillière, au calme dans les vestiaires homme, alors qu’il était en tenue d’Adam entouré par de nombreux japonais, eux aussi dénués de vêtement mais faisant preuve de beaucoup moins de gêne apparente vis à vis de la situation.

C’est seulement une fois sortis des bains que nous avons réalisé que la nuit était tombée et qu’il nous restait tout juste le temps de nous rendre au Grand Bouddha pour en profiter une poignée de minutes. Après une rapide concertation, nous arrivons à la conclusion que Kamakura figurera de nouveau sur notre liste lors de notre prochain voyage et décidons de passer encore un peu de temps sur place avant de retourner tranquillement à la capitale. Sans aucun regret, puisque les lieux étaient désormais pratiquement vide et que nous avons pu arpenter dans un calme absolu le chemin qui mène aux sanctuaires dédiés aux trois déesses protectrices de l’île (Akatsunomiya, Hetsunomiya et Okotsunumiya).

Cette petite ascension nocturne nous aura permis de finir la journée sur une petite touche bucolique, de prendre notre petite dose de chats (oui, nos petits amours nous manquent beaucoup) ainsi que de prendre quelques photos souvenir, l’endroit étant particulièrement photogénique. Et aussi parce que “Trois Déesses protectrices” et “symbole en forme de triple triangles empilés”, ça fait forcément une bonne anecdote de voyage.

Mais l’heure tourne, et nous remontons dans le train du retour à une heure déjà bien avancée en discutant déjà de l’organisation du prochain voyage. Nous avons beaucoup apprécié notre excursion et l’atmosphère du littoral et comptons bien y retourner, réalisant comme à chaque fin de journée que nous n’avons fait qu’effleurer ce que le lieu du jour et ses alentours avaient à offrir. Kamakura est vraiment l’un de nos (multiples) coups de cœur au Japon. Épuisés par notre journée, nous effectuons un rapide passage au ravitaillement avant de rentrer directement à l’hôtel pour ranger notre chambre et plier bagages. C’est la fin de notre séjour à Tôkyô, nous sortons dès demain de l’enceinte de la mégalopole pour nous mettre un peu au vert à Hakone. Mais pour l’instant, c’est avec un mélange d’excitation et de mélancolie que nous nous endormons en nous remémorant tous nos souvenirs de cette première semaine riche en découvertes et en dépaysement.

*Si vous souhaitez en découvrir un peu plus sur la culture des Onsen, nous vous invitons à découvrir la vidéo imRodolphe – 80 Jours Japon.

 

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