Lauréat du prix “Best narrative” aux Game Awards de 2017 et second jeu du studio Giant Sparrow, What remains of Edith Finch est un walking-simulator en vue subjective, sorte de croisement entre la promenade contemplative et le livre audio. Projet de longue haleine puisque cinq années auront été nécessaire à sa gestation, les promesses du jeu étaient alléchantes dès son annonce en grandes pompes lors du Playstation Experience de 2014. Trois ans plus tard, force est de constater que le studio a fait du chemin depuis Unfinished Swan.
What remains of Edith Finch nous met dans la peau d’Edith, 17 ans et dernière représentante vivante de la lignée des Finch, dont la mère, décédée des suites d’une maladie inconnue, a fait l’héritière de la maison familiale. Intriguée par le testament de cette dernière, constitué uniquement de l’acte de propriété de l’étrange masure et d’une clé mystérieuse, notre protagoniste va donc retourner sur les lieux de son enfance afin de retracer l’histoire de son arbre généalogique.
Maison Borniol
C’est donc au rythme, lent et posé, à la fois de la démarche et du monologue intérieur de notre protagoniste que le joueur va explorer cette imposante et intimidante bâtisse laissée à l’abandon à la suite d’un départ manifestement précipité il y a de ça quelques années. Comme dans tout bon jeu du genre, l’histoire est le principal moteur de l’aventure, et un soin tout particulier a été apporté aux environnements et à la mise en scène. A ce titre, la découverte de la maison des Finch fait forte impression. Immense édifice bossu trônant au beau milieu d’une forêt, la baraque en impose, autant par ses dimensions que son architecture incongrue. Et une fois à l’intérieur, l’impression de pénétrer dans une sorte de sanctuaire où le temps semble s’être suspendu étreint le joueur. Encombrée d’un immense fourbi de meubles, de livres, et de tableaux, et composée d’une multitude de chambres scellées, la maison est en effet un véritable musée à la mémoire de ses anciens occupants, et son exploration révèlera rapidement bon nombre de passages secrets exigus permettant d’outrepasser les limites et de pénétrer dans l’intimité de chacun des membres de la famille.
Les contes de la Crypte
Chaque point d’intérêt est l’occasion pour Edith de nous narrer de sa douce voix, en anglais, une anecdote sur un des membres de sa famille, sous-titrée en surimpression des éléments du décor, à travers la diégèse du jeu. Une astuce de mise en scène qui ne paye pas de mine de prime abord, mais qui démultiplie l’impact du propos du jeu et qui permet de recadrer subtilement l’attention et la caméra du joueur, assurant une progression fluide dans les entrailles de la demeure. Une nouvelle chambre traversée est une occasion pour le joueur de mettre la main sur divers documents permettant d’en apprendre plus sur le contexte de la disparition de son ancien occupant et de revivre ses derniers instants. C’est sous la forme de courtes séquences de jeu que l’on se retrouve acteur de la fin de l’ensemble de la famille Finch. Souvent cruelles mais rarement ordinaires, ces petites histoires sont autant de contes ayant chacun leur propre tonalité et leur propre mise en scène. Entrer plus en détail gâcherait allègrement ce qui fait tout le sel d’Edith Finch, aussi sachez juste qu’à maintes reprises, le jeu surprend par sa capacité à faire entrer en résonance forme et contenu, et l’adéquation entre discours et gameplay (souvent minimaliste, on reste dans le Walking Simulator de luxe, mais jamais plus) est d’une cohérence souvent confondante. Sur la poignée d’heures que dure l’aventure (comptez-en environ deux pour assister à sa conclusion), quelques séquences seront évidemment plus faibles, et dotées d’un intérêt plus obscur, mais dans l’ensemble, ça marche, et pas qu’un peu.
Conclusion
Périlleux exercice que de jauger un jeu purement narratif. Dépendant énormément de la sensibilité de chacun, suivant les thématiques abordées, de l’univers développé et de la maîtrise globale de la mise en scène, le succès ou l’échec d’un jeu de cette catégorie dépend uniquement de sa capacité à embarquer le joueur dans le trip qu’il propose. En ce sens, What remains of Edith Finch met toutes les chances de son côté en proposant une expérience, un brin fantastique, à la saveur aigre-douce unique, empreinte de nostalgie envers une famille qu’on a rencontrée seulement deux heures plus tôt. Si le genre vous intéresse, ou que vous hésitez à vous lancer, alors foncez sans regret.
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